Aujourd’hui, la majorité du territoire français est favorable au développement de la chenille processionnaire du pin. À mesure que les hivers deviennent plus doux, sa colonisation s’étend, à la faveur directe du réchauffement climatique. Et cette dynamique semble loin de s’inverser.
Un insecte directement influencé par le climat
Des hivers trop doux pour freiner l’espèce
Les températures clémentes enregistrées depuis plusieurs hivers permettent à la chenille processionnaire de s’établir durablement dans de nouvelles zones. En réalité, seules des températures extrêmes peuvent limiter sa progression :
- En dessous de 0 °C : les chenilles cessent de s’alimenter,
- En dessous de –16 °C : la colonie meurt.
Or ces niveaux sont devenus exceptionnels dans la majorité des régions françaises.
Selon une étude récente de l’INRAE, l’augmentation des températures hivernales et un meilleur ensoleillement favorisent la progression de la chenille processionnaire du pin vers le nord et vers des zones jusque-là peu exposées.
Une capacité d’adaptation impressionnante
La chenille cible en priorité les pins noirs d’Autriche, pins d’Alep et pins Laricio. Mais face à la raréfaction ou au stress hydrique de ses hôtes naturels, elle est capable d’étendre son régime alimentaire à d’autres conifères, comme :
- L’Abies concolor (Alpes de Haute-Provence),
- Les sapins Nordmann (Aveyron),
- Les sapins pectinés (Drôme).
Elle s’installe dans les forêts, mais aussi le long des autoroutes, des zones urbaines, et des parcs municipaux. Sa capacité de survie est renforcée par un mécanisme appelé diapause : elle peut rester jusqu’à 5 ans à l’état de chrysalide, en attente de conditions favorables.
Des cycles de vie bouleversés et des invasions précoces
L’exemple du cycle 2015/2016
L’année 2015-2016 a été un tournant majeur dans la progression de l’insecte. Avec un été et un hiver anormalement chauds, les colonies ont explosé :
- Sud-Est (Piémont Méditerranéen, Sud du Massif Central)
- Nord Bretagne,
- Pyrénées-Orientales, Corse, Alpes de Haute-Provence.
Les processions ont démarré dès décembre, parfois même fin octobre dans la Côte-d’Or. La période à risque s’est donc étalée sur plus de 6 mois, causant de nombreuses atteintes sanitaires (urtications, œdèmes, allergies, nécroses…).
Une progression géographique spectaculaire
Vers le nord et l’est
L’insecte a désormais été observé :
- Dans le Calvados, à Fresné-la-Mère,
- En Manche, à Vergoncey,
- En Côte-d’Or, avec une présence marquée.
Les modélisations prévoyaient une arrivée à Paris intra-muros en 2025, mais la chenille processionnaire y est déjà installée depuis 2015.
Et en altitude aussi
La chenille a franchi :
- Les 1 500 mètres dans les Pyrénées,
- Les 2 000 mètres dans les Alpes, versant sud.
Grâce à sa capacité à rester en dormance (diapause), elle s’adapte aussi bien aux zones de montagne qu’aux climats extrêmes, jusqu’à certaines zones subsahariennes.
Une expansion plus rapide que prévu, aux conséquences sanitaires réelles
La progression de l’insecte est bien plus rapide que les scénarios initiaux des chercheurs. Et chaque nouvelle zone atteinte connaît souvent un niveau d’infestation élevé, avec :
- Des périodes de processions plus longues que la normale,
- Des risques sanitaires accrus et répétés pour les humains et les animaux.
Ce que l’avenir nous réserve
Les températures enregistrées au printemps 2017 ne font que confirmer cette tendance à l’extension. Si aucun événement climatique majeur ne vient l’interrompre, la chenille processionnaire du pin continuera à coloniser les zones jusqu’ici épargnées, y compris les centres-villes et les zones montagneuses reculées.